Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
l'écrivoire
30 septembre 2013

En retard... (partie 4 : le jeu du dictionnaire 2)

Atelier du 06/02/2013

 

            Je mets mes corozos sur la table et retrouve Sophie. Je lui offre le bouquet de fleur que je viens d’acheter à la saurisserie, cette boutique spécialisée dans les cadeaux d’excuses. La nuit dernière, elle m’a surpris dans le lit avec une autre, et elle avait été très vexée que ce soit Liliane, sa meilleure amie. Elle accepte le bouquet, mais ne peut s’empêcher de me faire une réflexion :

-                « Tout de même, tu aurais pu choisir une inconnue, moi je fais toujours l’effort de prendre des hommes de passage. Maintenant, ça va jaser autour de nous. Et puis, tout le monde sera là ce soir opodeldoch ! Franchement… Enfin bon, c’est fait c’est fait ».

Je la rassure en lui disant que je répéterai à tout le monde que Liliane était un mauvais coup. Sophie se radoucit. Nous sommes amoureux, pas comme ces couples qui s’engagent. L’engagement, c’est toujours signe que ça va mal. Je lui demande de me raconter sa journée.

-                « Oh, comme tu m’as trompée, je suis allée chez une voyante » me dit-elle. « J’étais forcément un peu embarrassée quand j’ai dû baisser ma culotte pour lui montrer ma rai-de-cœur, mais après avoir lu dedans elle m’a assuré que je serais encore longtemps heureuse en amour, ça m’a rassuré ».

Heureux que tout se soit passé pour le mieux, je la prends par le bras. Il est temps d’aller fêter le doctorat de Martin à l’opodeldoch organisé en cet honneur, qui doit ensuite être suivi par un dîner chez Pierre et Colette, un couple d’amis de Martin et moi, mais plus riches et plus âgés. Pierre était en réalité l’ancien directeur de thèse de Martin. Sophie me dit que la rumeur prétend que Colette s’apprête à annoncer un heureux événement. Peut-être est-elle préceinte ?

             Nous arrivons dans la maison de Pierre et Colette. C’est une belle demeure du XVIIIe siècle avec un immense jardin. Martin est un peu éméché, et conte fleurette à Liliane. Elle et moi avions discuté au opodeldoch, je lui avais expliqué que pour le bien de mon couple je devrai la dénigrer. Elle s’est montrée très compréhensive.

-                « Avec le succès que j’ai en ce moment, écorner mon image ne peut pas me faire de mal. Franchement, deux semaines sans dormir une fois à la maison… ça m’épuise », m’avait-elle dit alors.

Mais maintenant que nous voilà chez Pierre, je constate que je n’y suis pas allé assez fort, en tout cas pas assez pour un Martin éméché. J’essaierai d’être moins tendre au dîner, ça rendra doublement service, à Liliane et à Sophie.

-                « Oh, regarde le gazon ! » s’écrit alors Sophie. « Là, un brin d’herbe en forme de cheval, et là, en forme de tuba ! ».

-                « Oui, j’ai passé le rotangle, et j’en suis très satisfait, ça donne des formes très originales » nous dit Pierre en descendant de son perron pour nous accueillir. « Par contre, la machine est capricieuse. Tenez, là-bas, à côté des pétunias, il ne m’a coupé l’herbe qu’en forme de petits soldats, on croirait l’armée de terre cuite ! ».

Nous arrivons finalement à table. Colette a préparé des cailles farcins. Le repas se passe, et le couple semble ému. C’est finalement arrivé au dessert que Colette nous annonce l’heureux événement.

 -                  « Ça alors ! » s’écrit Sophie à mon bras alors que nous rentrons chez nous. « Pierre et Colette divorcent, c’est génial ! ».

-                « Ils ont mis fin à treize ans d’engagement, c’est vrai que c’est pas mal, de nos jours » renchéris-je. « Ils vont pouvoir avoir de nouveau des aventures, ça va les rapprocher ».

-                « Oui » fait Sophie, « je me souviens de leur mariage. Quelle tristesse ! Colette a porté le deuil pendant des mois ».

-                « Et puis » reprends-je, « sans vouloir être matérialiste, on leur avait offert une superbe argenterie pour alléger leur peine. Je suis bien content qu’on la retrouve, j’en ai marre de manger dans des assiettes en arcopal ! Heureusement qu’ils redistribuent les cadeaux de mariage ! »

En fait, je pensais que Colette serait préceinte, mais a bien y réfléchir, cela aurait été difficile, vu que comme tous les couples mariés, Pierre et Colette ne consommaient plus. Soudain, Sophie prend un air gêné.

-                « Désolé » me fait-elle, « il faut que je tourne à gauche maintenant. En fait, je ne dors pas à la maison. Ce soir, je te trompe ».

-                « Ah bon ? » fis-je surpris. « Pourtant tu as l’air gênée, qu’est-ce qui ne va pas ? »

-                « C’est que… tu le connais. C’est Martin. Il me faisait tellement de peine avec Liliane que je lui ai promis de le rejoindre. Et puis, c’était son opodeldoch, c’est quand même quelque chose à fêter ! ».

Bien sûr, ayant moi-même à me faire pardonner, je l’excuse et me résous à dormir seul. Un couple est fait de concessions.

Publicité
Commentaires
Archives
Publicité
Publicité